12 septembre 2025 Nabil Bouamama

Les dernières modifications de financement du programme ESMS numérique

L’instruction du 2 septembre 2025 modifie de manière significative le financement du programme ESMS numérique pour sa dernière année de sa généralisation. Les trois principaux changements sont les suivants :

  • Une enveloppe de 6,5 M€ est transférée du budget du programme ESMS numérique vers le programme SONS ((Système Ouvert et Non Sélectif), Vague 2, réduisant le premier de 83 M€ à 76,5 M€ ;
  • Le total des enveloppes régionales passe de 70 M€ à 63,5 M€, impactant la plupart des régions à l’exception de la Corse et des Outre-mer, dont les enveloppes restent stables ;
  • Les établissements d’accueil, d’hébergement et d’insertion (AHI) deviennent éligibles au programme SONS, et l’obligation d’atteindre des cibles d’usage pour la messagerie sécurisée de santé (MSSanté) et le dossier médical partagé (DMP)/Mon Espace Santé est levée pour les AHI non éligibles au SONS.

Programme ESMS numérique : 83 M€ réalloués pour la phase finale de généralisation en 2025

Le programme ESMS numérique pour les établissements médico-sociaux (ESMS), qui s’inscrit dans le cadre plus large du Ségur numérique, a pour objectif d’accélérer la mise en œuvre et l’utilisation effective du Dossier de l’Usager Informatisé (DUI), interopérable au sein de tous les établissements. L’année 2025 marque la phase finale de généralisation de ce programme, qui a déjà permis de financer 21 200 structures depuis son lancement.

Avant la publication de l’instruction du 2 septembre, le cadre de financement pour 2025 était établi par la précédente instruction DNS/DGCS/CNSA du 16 avril 2025, qui prévoyait une enveloppe 2025 spécifique de 83 M€ pour le programme ESMS numérique, avec un déploiement conforme aux années précédentes : pilotage déconcentré aux ARS, financement à l’usage, obligation de mutualisation pour les porteurs de projets et soutien aux petites structures.

L’instruction modificative du 5 septembre 2025 a pour but de compléter et de modifier celle du 16 avril. Son impact est double : elle revoit la répartition des fonds pour l’année 2025 et modifie les modalités de financement applicables à des catégories spécifiques de structures.

Ségur numérique médico-social : 6,5 M€ transférés pour soutenir les éditeurs de logiciels

La modification la plus importante introduite par l’instruction du 2 septembre 2025 est la réaffectation de 6,5 M€ pris sur l’enveloppe initiale pour être affectés à l’abondement du programme SONS (Système Ouvert et Non Sélectif), dans le cadre de sa Vague 2. Cette réorientation des crédits a été sollicitée par la Délégation au Numérique en Santé (DNS), dans le but d’« optimiser l’utilisation des financements disponibles pour cette dernière année d’engagement des crédits Ségur numérique médicosocial ».

Cette modification budgétaire est destinée à faciliter la généralisation du programme. Celle-ci dépend à la fois de la capacité financière des structures et de la disponibilité d’une offre logicielle conforme et interopérable sur le marché. En redirigeant des fonds vers le programme SONS, qui subventionne la mise en conformité des logiciels édités, les autorités de tutelle envoient un signal clair aux éditeurs de solutions logicielles, afin qu’ils répondent à la demande des établissements qui n’auraient pas encore achevé leur transformation numérique.

Les crédits régionaux passent de 70 à 63,5 M€, avec une dotation préservée pour les outre-mer

Le total des enveloppes régionales, initialement prévu à 70 M€ (56 M€ d’appels à projets et 14 M€ de seconde délégation FMIS), est réduit à 63,5 M€. Cette nouvelle enveloppe est répartie entre les régions au prorata du nombre d’ESMS de chacune. La nouvelle répartition est détaillée dans le tableau ci-dessous.

L’instruction maintient une allocation de 500 K€ pour la Corse et les territoires d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique, Mayotte), contrairement aux autres régions, qui voient leur enveloppe régionale de crédits réduite. Cette mesure est une manifestation concrète du principe de « soutien renforcé aux organismes gestionnaires de petite taille », particulièrement pertinents dans ces territoires où les défis logistiques et la fragmentation du tissu d’établissements sont plus marqués. Elle assure que la généralisation numérique ne laisse pas de côté les acteurs les plus fragiles, garantissant une certaine équité territoriale dans le déploiement du programme.

Certaines activités des AHI bientôt éligibles à la Vague 2

La nouvelle instruction du 5 septembre modifie les modalités de financement pour les établissements AHI. L’instruction précédente du 16 avril précisait uniquement que les solutions logicielles choisies par ces structures devaient être candidates au référencement Ségur. La nouvelle instruction est plus extensive : certaines catégories d’activité de ces structures deviendront éligibles au programme SONS Vague 2.

Un arrêté de la Délégation au Numérique en Santé (DNS) est attendu dans le courant de l’année 2025 pour préciser quelles seront les catégories d’établissements AHI rendues éligibles. Cette extension de l’éligibilité reconnaît l’importance de ces structures dans le maillage médicosocial et les intègre plus directement dans la logique de conformité et d’interopérabilité visée par le programme SONS.

Les AHI bénéficieront d’un assouplissement important, car l’instruction du 2 septembre stipule que les établissements AHI qui ne sont pas éligibles au programme SONS n’auront pas d’« obligation stricte d’atteinte des cibles d’usage » pour  MSSanté et le DMPartagé / Mon Espace Santé.

Cette mesure témoigne d’une vision pragmatique de la généralisation du programme ESSMS Numérique. Les établissements AHI, par la nature de leurs missions d’accueil et d’insertion sociale, n’ont pas un usage intensif des outils médicaux d’échange et de partage de données comme la MSSanté ou le DMP. Maintenir une obligation de taux d’usage élevé pour ces outils, qui pouvait atteindre 70% dans d’autres contextes du programme, aurait potentiellement constitué un frein à leur participation. En assouplissant cette condition, l’instruction permet à ces établissements de se concentrer sur l’objectif principal du programme, à savoir la mise en place d’un DUI (dossier de l’usager informatisé), sans être pénalisés par des cibles qui ne correspondent pas pleinement à leurs activités.

Les perspectives : réallocation des crédits et assouplissements pour adapter le Ségur aux réalités du terrain

Pour les ESSMS qui planifiaient de répondre aux appels à projets régionaux, la réduction des fonds alloués peut nécessiter un ajustement de leurs projets. L’annonce de ces changements le 5 septembre, avec une date butoir pour les projets régionaux fixée au 15 septembre, a laissé très peu de temps pour ces adaptations.

Les établissements AHI bénéficient quant à eux d’une clarification et d’un assouplissement bienvenus, ce qui est susceptible d’encourager la participation des structures les moins familiarisées avec les exigences du Ségur numérique. Pour l’écosystème des éditeurs de logiciels, l’abondement du programme SONS est un signal fort, les incitant à accélérer la mise en conformité de leurs solutions.

L’instruction du 2 septembre n’est pas un simple texte de redéploiement de crédits ; elle s’inscrit au contraire dans une logique d’optimisation de la stratégie du Ségur numérique. En réaffectant des fonds elle devrait permettre de lever les derniers goulots d’étranglement du marché de l’e-santé, tout en adaptant les exigences du programme à la diversité des structures qu’il vise à inclure.

Instruction n° DNS/DGCS/CNSA/2025/100 du 2 septembre 2025