- 70% des jours d’hospitalisation NHS concernent des maladies chroniques.
- Le modèle hospitalier actuel génère des surcoûts sans gains cliniques démontrés.
- Le suivi à distance et l’hospitalisation à domicile sont au cœur des recommandations du think tank Re:State
- Des équipes locales « SWAT » accompagneraient le changement organisationnel.
- Une messagerie sécurisée clinicien-à-clinicien est préconisée à l’échelle nationale.
- L’IA générative doit accélérer la localisation des experts NHS via un annuaire intelligent.
- Un financement stable sur 5 ans des Virtual Wards est proposé.
Une logique post-guerre devenue inadaptée et coûteuse
Historiquement conçu pour traiter des pathologies aiguës et infectieuses, l’hôpital britannique concentre aujourd’hui des ressources lourdes dans des bâtiments qui peinent à répondre aux besoins des patients chroniques et polymorbides. Près de 70 % des jours d’hospitalisation concernent des pathologies chroniques. Le rapport analyse les tentatives actuelles de déplacement de soins spécialisés vers les communautés (consultations spécialisées en soins primaires, centres diagnostiques communautaires). Si ces modèles améliorent ponctuellement l’accès et la satisfaction des patients, ils génèrent des surcoûts (dédoublement des ressources, dilution des compétences, augmentation de la demande induite) sans gain cliniquement prouvés. Le modèle actuel coûte cher, dégrade la productivité.
70% des lits occupés par des soins chroniques : Re:State propose de décongestionner l’hôpital par le suivi virtuel
Le think tank britannique Re:State propose de redéfinir l’hôpital autour du soin à distance et du suivi virtuel, notamment dans un modèle plus adapté à la prise en charge des maladies chroniques. Pour Re:State, l’avenir réside dans une approche « Hopital of the future : Hospital as a service, not a building » s’appuyant sur les capacités numériques : suivis à distance, hospitalisation à domicile et monitoring continu permettent de délivrer des soins complexes sans mobiliser systématiquement le lit hospitalier. Le rapport « Hospital as a service, not a building », publié en mai 2025 appelle à une refonte du NHS et propose plusieurs pistes.
21 mesures pour rediriger les ressources du NHS
Repenser les parcours : prioriser les soins de proximité assistés par le spécialiste
- Réviser les parcours multimorbidité-fraîgilité : Les systèmes intégrés de soins (ICS) doivent conduire des revues cliniques de leurs parcours, sur le modèle du programme « Get It Right First Time », afin de mieux articuler soins primaires, secondaires et sociaux. L’objectif : renforcer la capacité des médecins généralistes, avec un appui spécialiste à distance.
- Identifier les soins compatibles avec le virtuel : Un audit national devrait distinguer les actes nécessitant une présence physique de ceux adaptables à une approche « virtual first », posant les bases d’une réorganisation des parcours.
- Tester de nouveaux financements en soins primaires : Re:State propose des pilotes de trois ans où les GPs seraient rémunérés à l’acte pour certaines consultations spécialisées, avec un tarif prenant en compte la complexité des cas multimorbides.
- Déployer des équipes locales de transformation : Chaque ICS pourrait mobiliser des équipes « SWAT » d’experts en conduite du changement, financées par le Department of Health (DHSC), pour accompagner la mise en œuvre des nouveaux parcours.
Miser sur la communication clinique en temps réel : Avis spécialisés sous 24h : l’atout d’un annuaire NHS boosté à l’IA générative
- Un réseau national sécurisé clinicien-à-clinicien : Re:State recommande la création d’une plateforme de communication nationale, intégrant messagerie, visioconférence et partage de données en temps réel, opérant sous supervision du DHSC avec des exigences renforcées de cybersécurité.
- Annuaire NHS dopé à l’IA : Un annuaire national adossé à de l’IA générative permettrait de localiser rapidement les experts pertinents dans l’ensemble du NHS, réduisant les délais d’avis spécialisé.
- Incitations financières pour les avis à distance : Les ICS pourraient introduire des incitations (bonus ou pénalités) pour favoriser la participation des spécialistes à ces plateformes de conseil inter-cliniciens.
Structurer l’hôpital autour du soin à distance : un financement sécurisé sur 5 ans
- Remote General Hospitals : premiers pilotes : Trois ICS fusionnés pourraient expérimenter des « hôpitaux généraux à distance », avec urgences virtuelles, dermatologie, ophtalmologie et suivi ambulatoire à distance comme noyau initial. L’évaluation porterait sur les coûts, les résultats cliniques et l’expérience patient.
- Former massivement les cliniciens à la télémédecine : Le NHS et les Collèges médicaux seraient chargés d’intégrer la téléconsultation et le monitoring à distance dans les curricula de formation initiale et continue.
- Financement pluriannuel des Virtual Wards : Le DHSC devrait accorder une enveloppe sur 5 ans pour stabiliser le financement des hôpitaux à domicile, assortie d’objectifs de capacitaire mesurables.
- Intégrer les EHPAD dans les Virtual Wards : Des incitations tarifaires pourraient encourager les maisons de retraite à participer activement au suivi hospitalier à domicile, notamment via le monitoring connecté.
- Interopérabilité des dispositifs connectés : Le NHS devra édicter des standards techniques pour assurer l’interopérabilité des dispositifs de monitoring avec les dossiers patients électroniques.
Dossier clinique unifié : socle technique indispensable
- Unification des données cliniques : Le Dossier Clinique Unifié (UCR) servirait de référentiel unique à tous les acteurs du NHS. Tous les EPR devront être compatibles UCR, facilitant le partage en temps réel et l’analyse populationnelle.
- Standards nationaux de données et contrats EPR limités à 5 ans Le DHSC fixerait des standards obligatoires (codification, modèle de données, interopérabilité) et limiterait à 5 ans les contrats des fournisseurs de logiciels hospitaliers pour stimuler l’innovation et la compétition.
Virtual Ward de Cambridge : 85 patients suivis à distance pour un tiers du coût habituel
A Cambridge University Hospitals NHS Foundation Trust, le Virtual Ward est devenu un laboratoire du soin hospitalier à distance. Jusqu’à 85 patients peuvent y être pris en charge simultanément par une équipe réduite composée d’un consultant généraliste, d’un médecin junior et de 3 à 8 infirmiers. Basée dans un bureau au sein de l’hôpital Addenbrooke, l’équipe assure une surveillance continue via des dispositifs de monitoring à distance et une interface numérique de gestion des patients. Le coût moyen d’une journée d’hospitalisation virtuelle y est estimé à 90£, contre 300£ en hospitalisation conventionnelle. Surtout, les réadmissions à 30 jours y sont divisées par deux (6-10% contre 12% en hospitalisation classique). Ce modèle permet de décongestionner les lits physiques et de rediriger les ressources hospitalières vers des actes complexes non délocalisables.
Une stratégie exportable ?
L’approche de Re:State anticipe les mutations structurelles que connaîtront nombre de systèmes de santé sous la pression du vieillissement et des maladies chroniques. L’articulation entre soins de proximité renforcés, plateformisation des expertises et socle numérique interopérable dessine un modèle hôpital-hors-les-murs potentiellement exportable.